Terrence Malick : La beauté du monde
Tout comme Stanley Kubrick ou Michael Cimino, Terrence Malick est l’un des cinéastes les plus énigmatiques des 30 dernières années. En à peine quatre films — le cinquième est prévu pour mai 2010 —, il s’est imposé comme un formidable formaliste, grâce à la beauté onirique de ses images, et comme un artiste dont l’uvre est traversée par les questions essentielles de l’amour et de la mort.
Né au Texas en 1943, Malick grandit dans un environnement rural qui marquera ses films. Diplômé de philosophie de la prestigieuse université de Harvard, il se lance comme journaliste indépendant pour Life, Newsweek et The New Yorker. Ce qui ne l’empêche pas de poursuivre ses études à l’American Film Institute qu’il finance en réécrivant des scénarios, comme celui de L’inspecteur Harry. A peine diplômé, il prépare son premier long métrage : rejetant toutes les propositions des studios, il monte son budget grâce à plusieurs investisseurs et produit son film pour 350 000 dollars. Inspiré d’une histoire vraie, La Balade sauvage (1974) retrace l’épopée sanglante de deux amants qui ne peuvent pas s’aimer. D’emblée, le refus d’une narration conventionnelle et la beauté stupéfiante des grands espaces font de Malick un cinéaste-culte.
Quatre ans plus tard, Les Moissons du ciel est un nouveau chef d’uvre, évocation élégiaque d’une Amérique rurale peu à peu corrompue par l’appât du gain et le progrès technique. Consacrant deux ans au montage, le réalisateur gagne sa réputation de perfectionniste absolu. Mais le résultat lui vaut l’admiration de la critique internationale et le prix de la mise en scène à Cannes. C’est alors qu’auréolé de son succès, Malick disparaît… Certains prétendent qu’il aurait vécu à Paris, reclus, pour méditer. Sa légende grandit… Jusqu’en 1997, où il annonce qu’il s’attelle à l’adaptation d’un roman de James Jones sur la bataille de Guadalcanal. Réflexion métaphysique sur la guerre, La Ligne rouge (1998) réunit les plus grands comédiens américains du moment qui veulent tous tourner avec le cinéaste : George Clooney, Sean Penn, Adrien Brody, Nick Nolte, Woody Harrelson, John Travolta. En 2005, Malick revient avec Le Nouveau monde, relecture fascinante du mythe de Pocahontas. Plus panthéiste que jamais, le réalisateur montre à quel point la Nature est au fondement de l’identité culturelle. Une uvre sublime. Autant dire qu’on attend avec impatience Tree of Life, annoncé pour festival de Cannes. En espérant que Malick ne disparaîtra pas à nouveau pour les dix prochaines années…
Les moissons du ciel : La quête de l'absolu
On en a le souffle coupé ! En deux films seulement, Terrence Malick a imposé sa vision flamboyante du monde, puisant dans les mythes fondateurs de l’Amérique. Impossible, en effet, de ne pas songer aux idéaux pastoraux chers à Thomas Jefferson, ou encore aux romans de Mark Twain, en contemplant les images stupéfiantes du cinéaste. Expérience sensorielle époustouflante inspirée par City Girl de Murnau, Les Moissons du ciel placent la Nature au centre du récit — et de toute l’uvre de Malick : les champs brûlés par le soleil qui se confondent avec un ciel immense, la présence frémissante de l’eau qu’une brise vient rider, le rythme implacable des saisons et les nombreux plans d’animaux composent une admirable fresque panthéiste. Proches du Kubrick de Barry Lyndon, Malick et son chef-opérateur Nestor Almendros (fidèle collaborateur de Rohmer et de Truffaut) ont eu exclusivement recours à des éclairages naturels pour les scènes en extérieurs et ont surtout tourné pendant “l’heure magique” — ce moment précédant le crépuscule où les objets se nimbent d’un halo doré. D’où une atmosphère d’étrangeté et l’impression enivrante de plonger dans un tableau vivant.
Tragédie aux accents bibliques, Les Moissons du ciel se mue peu à peu en une quête désespérée du Paradis perdu et de l’innocence déchue. Car si le stratagème de Bill et d’Abby est immoral, Malick ne condamne pas ses personnages : ce sont seulement des êtres humains qui ont été chassés du jardin d’Eden. Bientôt, le “paradis” qui s’est créé autour du triangle amoureux est ravagé par les sauterelles — référence au chapitre 9 de l’Apocalypse —, le feu et la jalousie dévorante. Porté par la partition onirique d’Ennio Morricone et le Carnaval des Animaux de Saint-Saëns, le film nous transporte dans un monde où la rédemption n’a plus sa place. Mais quelle aventure fascinante !
Sam Shepard : Le peintre élégiaque de l'Amérique
Prix Pulitzer pour sa pièce Buried Child, comédien salué par la critique, scénariste et réalisateur reconnu, Sam Shepard est un artiste aux multiples talents qui a souvent puisé ses thèmes dans la mythologie de l’Ouest américain.
Né en 1943, Sam Shepard grandit dans une ferme avant de s’installer à New York à l’adolescence, où il découvre la Beat Generation. Et à 22 ans à peine, il est déjà un auteur dramatique remarqué dont deux pièces ont été montées au théâtre !
Il ne tarde pas à s’intéresser au cinéma. D’abord en écrivant des scénarios comme Zabriskie Point (1970) de Michelangelo Antonioni ou Paris, Texas (1984) de Wim Wenders, Palme d’Or à Cannes. Mais c’est surtout en tant qu’acteur qu’il s’impose vraiment auprès du grand public avec son visage longiligne et ses yeux clairs. Fermier dans Les moissons du ciel(1978) de Terrence Malick, astronaute dans L’étoffe des héros (1983) de Philip Kaufman, ou amant malheureux de Kim Basinger dans Fool for Love (1985) de Robert Altman (d’après sa pièce), il séduit l’Amérique.
Il poursuit une carrière éclectique en incarnant souvent les marginaux, les cow-boys déchus et les excentriques. Il s’est ainsi illustré dans Baby Boom (1988) de Charles Shyer, Potins de femme (1990) de Herbert Ross, L’Affaire Pélican (1994) d’Alan J. Pakula, The Pledge (2000) de Sean Penn et Don’t Come Knocking(2005) où il retrouve Wim Wenders vingt ans après Paris, Texas. On lui doit également deux films qu’il a lui-même écrits et réalisés : Far North (1988) et Le Gardien des esprits (1994).
Richard Gere : Le play-boy doué
Sex-symbol des années 80 et 90, Richard Gere a aussi su trouver des rôles à la hauteur de son talent en tournant pour les plus grands cinéastes américains.
Né en 1949, il étudie la philosophie et le cinéma avant de se tourner vers une carrière artistique. Dès la fin des années 70, il se fait remarquer dans A la recherche de Mr Goodbar (1977) de Richard Brooks, Les Moissons du ciel (1978) de Terrence Malick et Yanks (1979) de John Schlesinger. Mais c’est en incarnant un gigolo professionnel dans American Gigolo (1980) de Paul Schrader, un officier de la Marine dans Officier et gentleman (1982) de Taylor Hackford et un marginal dans A bout de souffle made in USA (1983) de Jim McBride qu’il accède au statut de star. En revanche, la seconde moitié des années 80 ne lui est guère favorable : Cotton Club (1984) de Francis Ford Coppola, Le Roi David (1985) de Bruce Beresford et Les coulisses du pouvoir (1986) de Sidney Lumet sont de cuisants échecs.
Alors que sa carrière semble dans l’impasse, Pretty Woman (1990) de Gary Marshall, où il campe un homme d’affaires amoureux d’une prostituée (Julia Roberts), le propulse de nouveau au sommet de l’affiche. Il tourne ensuite plusieurs thrillers, comme Sang chaud pour meurtre de sang froid (1992) de Phil Joanou et Peur primale (1996) de Gregory Hoblit. En 2000, il interprète un gynécologue dans Dr T et les femmes de Robert Altman, qui lui vaut les éloges de la critique.
Richard Gere enchaîne avec Infidèle (2002), puis avec un thriller surnaturel, La Prophétie des ombres (2002), et une comédie musicale, Chicago (2003), deux genres auxquels il ne s’était pas encore frotté. Il donne ensuite la réplique à Jennifer Lopez et Susan Sarandon dans Shall We Dance ? La nouvelle vie de Monsieur Clark (2004) et à Juliette Binoche dans Bee Season, où il incarne — changement de cap — un père de famille dévoué.
Bouddhiste convaincu, Gere s’est toujours investi personnellement dans la lutte du Dalaï Lama pour faire respecter les droits des Tibétains. Il prépare d’ailleurs actuellement un projet sur la vie de Bouddha réalisé par Shekhar Kapur, avec Goldie Hawn.
Brooke Adams :Le charme discret du talent
Fille de comédiens, Brooke Adams s’est rapidement imposée comme une actrice surdouée capable d’exprimer toutes sortes d’attitudes et d’émotions. Enfant, elle se produit dans Finian’s Rainbow à Broadway et, une dizaine d’années plus tard, elle décroche un rôle dans une série télé. Après avoir suivi les cours du célèbre Lee Strasberg, elle fait ses vrais débuts sur scène “off-Broadway” dans la reprise de La Forêt pétrifiée. En 1978, elle est à l’affiche de deux films qui propulsent sa carrière : Les Moissons du ciel de Terrence Malick et L’Invasion des profanateurs de Philip Kaufman. Un an plus tard, elle donne la réplique à Sean Connery dans Cuba de Richard Lester. Et pourtant, alors qu’elle est promise à une trajectoire de star, elle préfère prendre ses distances avec Hollywood et privilégie le théâtre au cinéma. Elle n’hésite pas non plus à refuser des offres alléchantes pour continuer à donner des cours d’art dramatique à des enfants en difficulté.
Elle gagne la sympathie du grand public grâce à plusieurs séries télé, comme Clair de lune ou, plus récemment, Monk. Au théâtre, elle se produit avec succès dans The Heidi Chronicles. Pour le grand écran, elle est à l’affiche de Gas, Food, Lodging (1992), film indépendant signé Allison Anders. On la retrouvera prochainement dans un thriller fantastique, The Legend of Lucy Keyes, avec Julie Delpy et Justin Theroux.