La canonnière du Yang-Tsé
Un film de Robert Wise
Sortie en salles : 30 décembre 2009
Visa n°32914
Etats-Unis - 1966 - 193 min - Cinémascope - Stéréo – Couleur |
Titre original : The Sand Pebbles
Les droits d'exploitation de ce film sont échus
En 1926, le San Pablo, une canonnière américaine avec à son bord le mécanicien en chef Jake Holman, remonte le fleuve Yang-Tsé. Le patrouilleur se retrouve bientôt au coeur de la guerre civile chinoise qui oppose communistes et nationalistes…
LA CANONNIÈRE DU YANG-TS… : épique et politique
Quel souffle ! C’est la première réaction suscitée par cette vaste fresque épique comme le cinéma américain n’en produit presque plus aujourd’hui. En metteur en scène chevronné, alors au sommet de son art, Robert Wise capte la splendeur des paysages chinois qui tranche avec les conditions de vie misérables des habitants : la photo, qui magnifie la nature, ne verse jamais dans l’esthétisme carte-postale. La réussite tient aussi à la prestation des comédiens, Steve McQueen en tête, qui parviennent à faire croire à leurs personnages de bout en bout. Un pari d’autant plus risqué qu’il s’agit d’une reconstitution historique et qu’Hollywood ne nous a pas toujours habitués à la subtilité dans ce genre d’entreprise… Le héros de Bullitt décrochera d’ailleurs son unique citation à l’Oscar. Mais La Canonnière est aussi une grande uvre politique. Tout comme Robert Altman avec M.A.S.H. quelques années plus tard, Wise a choisi de dénoncer l’engagement américain au Vietnam en transposant son propos dans un tout autre contexte. Du coup, il propose une réflexion passionnante sur l’absurdité de la guerre — de toutes les guerres — et soulève des questions essentielles : le devoir patriotique vaut-il qu’on lui sacrifie la dignité humaine ? Et quand donc les pays occidentaux comprendront-ils que le colonialisme est immoral et voué à l’échec ? Résistant à toute tentation moralisatrice, Robert Wise a l’audace de fustiger l’impérialisme US à une époque — 1966 — où la présence militaire américaine en Indochine recueille encore le soutien de l’opinion publique aux Etats-Unis. Le film, qui a reçu huit nominations aux Oscars, est à redécouvrir de toute urgence.
ROBERT WISE, un géant hollywoodien
Dans un pays — les Etats-Unis — où les réalisateurs sont rarement connus du grand public, Robert Wise fait figure d’exception. Car à partir des années 60, son nom devient associé aux grandes fresques épiques hollywoodiennes à succès.
Monteur réputé à partir des années 30, il collabore notamment avec Orson Welles sur Citizen Kane (1941) et La Splendeur des Amberson (1942). Dès 1944, il passe à la réalisation avec La Malédiction des hommes-chats, puis enchaîne avec Le Récupérateur de cadavres un an plus tard. Très vite, il impose son sens du rythme et sa maîtrise extraordinaire de la plupart des genres hollywoodiens. Il passe ainsi du western (Ciel rouge, 1948) au film de boxe (Nous avons gagné ce soir, 1949), sans oublier la science-fiction (Le jour où la terre s’arrêta, 1951).
C’est pourtant avec West Side Story (1961), adaptation de la comédie musicale de Jerome Robbins, que Robert Wise devient champion du box-office. Variation subtile sur le thème de Roméo et Juliette, le film remporte 11 Oscars ! Trois ans plus tard, il réalise le terrifiant La Maison du diable qui fait également coup double en décrochant l’Oscar du meilleur film et du meilleur réalisateur. Il enchaîne avec La Mélodie du bonheur (1965) qui s’impose comme l’un des plus gros succès commerciaux de la décennie. En 1966, il signe La Canonnière du Yang-Tsé, fresque étonnante dont les allusions à la guerre du Vietnam déconcertent le public — ce qui n’empêche pas le film de triompher au box-office.
Dans les années qui suivent, Robert Wise est moins prolixe. En 1979, il revient sur le devant de la scène avec Star Trek. Dix ans plus tard, il signe son uvre ultime, Rooftops, comédie musicale malheureusement boudée par le public et la critique. Robert Wise s’éteint en 2005 à l’âge de 91 ans.
STEVE McQUEEN : rebelle au cœur tendre
Dans la lignée d’acteurs comme James Dean, Marlon Brando et Paul Newman, Steve McQueen incarne une figure de rebelle solitaire vivant selon ses propres principes. Né en 1930, il s’engage dans les Marines pendant trois ans, avant de se tourner vers le théâtre. Après un passage à l’Actor’s Studio, il accepte de jouer un chasseur de primes dans un feuilleton télévisé, Au nom de la loi, qui lui assure une notoriété immédiate. C’est avec Le Kid de Cincinnati (1965) de Norman Jewison qu’il devient une star. Il enchaîne alors une série de films à succès, comme La Canonnière du Yang-Tsé (1966) de Robert Wise, L’Affaire Thomas Crown (1968) de Norman Jewison, Le Guet-Apens (1972) de Sam Peckinpah et Papillon (1973) de Franklin Schaffner. Son personnage de dur au visage imperturbable, mais incorruptible, fait de lui l’une des valeurs sûres d’Hollywood. Il disparaît prématurément à l’âge de 50 ans.
CANDICE BERGEN : belle et rebelle
Fille d’un très célèbre ventriloque, Candice Bergen apparaît dès son enfance dans des publicités, puis devient mannequin à l’adolescence. En révolte contre le conservatisme de ses parents, elle n’hésite pas à incarner une lesbienne dans Le Groupe (1965) de Sydney Lumet pour ses débuts au cinéma. L’année suivant, elle donne la réplique à Steve McQueen dans La Canonnière du Yang-Tsé de Robert Wise qui fait d’elle une star.
Pour autant, elle n’est pas encore vraiment prise au sérieux par la critique. Avec Soldat bleu (1970) de Ralph Nelson, elle prouve qu’elle est particulièrement concernée par la condition des Indiens d’Amérique. Elle n’hésite pas à inscrire son nom aux génériques d’uvres controversées comme Ce plaisir qu’on dit charnel (1971) de Mike Nichols et Le Lion et le vent (1975) de John Milius.
Après son mariage avec Louis Malle en 1980, elle se produit moins au cinéma. On la retrouve pourtant dans l’un de ses meilleurs rôles aux côtés de Jacqueline Bisset dans Riches et célèbres (1981), tout dernier film de George Cukor. Mais à partir de 1988, elle décroche le rôle-titre de la série culte Murphy Brown, où elle campe une journaliste de télévision au tempérament d’acier. Elle revient de temps en temps au cinéma avec Miss Détective (2000) de Donald Petrie ou The Women (2008) de Diane English, remake du chef d’uvre de… George Cukor. La boucle est bouclée !